COMPTE RENDU DE LA REMISE DES PRIX DES XXVIIe IUVENALIA
Non, ce n’est toujours pas de moi. Je suis bien capable de vous produire de la chronique et du compte rendu à la pelle, mais ne comptez pas sur moi pour vous faire le coup du poète. Le titre de compte rendu-ci est emprunté à Jean Cocteau et m’a semblé décrire au mieux la remise des prix des XXVIIe Iuvenalia, le plus célèbre des concours de latin. La cérémonie avait lieu ce mercredi 14 mai 2014, en la salle Dupréel de l’ULB. Impatience du jour : les affiches n’étaient pas encore placardées, les prix étaient encore dans leurs cartons et le staff technique s’acharnait encore à faire sortir un son des baffles, que les premiers lauréats piétinaient déjà dans le hall d’honneur…
Des dos ont souffert, des protections déodorantes ont été mises à mal, des ascenseurs ont été maltraités et maudits, mais au final, tous les prix ont pu être hissés par le Conseil d’Administration de notre association jusque sur l’estrade. Le décor était posé, le spectacle pouvait commencer. Il s’est ouvert, comme de coutume, par le discours annuel de notre présidente, Madame Claire Verly. Elle a félicité tous les lauréats et les a remerciés pour leur enthousiasme, leur brio et leur réussite. Elle leur a rappelé que sans eux, l’enseignement des langues anciennes n’aurait plus lieu d’être. Madame Verly a ensuite lancé un vibrant appel aux décideurs politiques, qui se penchent sur la réforme du premier degré et favorisent l’adoption d’un tronc commun. L’option latine ne doit pas y être négligée ou présentée comme un choix secondaire. Les statistiques et les témoignages concordent : les élèves sortant du secondaire, après avoir suivi quatre heures de latin durant six années, réussissent plus facilement et plus brillamment leurs études supérieures.
Succédant à Madame Verly, Madame le professeur émérite de philologie latine Ghislaine Viré dévoila aux lauréats les qualités de son enseignement et les mystères de la langue latine. Elle leur adressa un SMS de félicitations à l’occasion de leur victoire au concours et entreprit ensuite de le traduire dans la langue de César et Cicéron. Avec maestria, elle leur démontra la filiation entre les deux langues, leurs tournures parallèles, mais aussi leur fatal éloignement. Les lauréats et leurs parents en demeurèrent éblouis : l’espace d’un instant, le latin avait repris vie devant eux et sonné comme la langue vernaculaire, la lingua franca qu’il fut jadis.
Le moment était venu d’éteindre les lumières de la salle Dupréel et de laisser place à l’Art et au spectacle. Le premier morceau de bravoure nous fut offert par les élèves de l’Athénée Royal de Waremme et leur professeur, Madame Nadine Roly. La vidéo de leur projet « Metamorphosis » fut projetée et récolta de vifs applaudissements. Pour avoir lu le compte rendu de cet épisode dans ce bulletin-même, vous êtes parfaitement informés des tenants et aboutissants de ce montage. Le second morceau nous fut offert par les élèves de l’Athénée Royal Marguerite Bervoets de Mons et leurs professeurs, Madame Françoise Delabaye, professeur de latin, et Madame Nathalie Appart, professeur de français. Il s’agit d’une pièce de théâtre, la reconstitution d’un débat philosophico-éthique au sujet de l’héritage grec de notre civilisation actuelle. La première de cet ensemble choral avait eu lieu, lors de la Matinée Hellénique, et récolta à nouveau les vivats de la salle.
L’instant suprême combla les espérances des lauréats : la remise des prix fut une fois encore à la hauteur de sa réputation, grâce à nos généreux mécènes et donateurs. Les septante-sept élèves couronnés, montèrent à leur tour sur l’estrade pour recevoir leurs récompenses des mains de notre présidente, de Madame Viré, mais aussi de Madame Christine Ponchon et Monsieur Jean-Philippe Mogenet, inspecteurs des cours de langues anciennes, ainsi que de Madame Chantal Lietz, représentante de notre association-sœur, la Fédération des Professeurs de Latin et de Grec, la FPGL. Vous trouverez juste à la suite de ma signature, la liste complète des heureux élus. Plus d’un arbora un sourire crispé au moment de traverser la salle sous les regards attentifs de ses parents, professeurs et camarades. Mais soyez assurés que tous repartirent avec un sourire béat, après avoir découvert les livres, jeux, places, entrées gratuites et autres gratifications en espèces, empaquetés par les bons soins de notre Conseil d’Administration.
Heureux qui comme Ulysse a remporté un prix aux Iuvenalia… L’odyssée de nos chers élèves débute à peine, gageons cependant qu’elle sera des plus fructueuses et qu’ils accumuleront sur leur front, les lauriers et les palmes académiques, au point d’en avancer courbés. Et qui sait ? Peut-être un jour, liront-ils ces comptes rendus et seront-ils sur cette estrade à remettre eux-mêmes des prix… Ils seront alors devenus des adultes responsables et les égaux de leurs maîtres à penser.
Naïm HERAGHI